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LIGNE 08 | ÉTÉ 2023

Dernière mise à jour : 2 août

JOIE DES VILLES, JOIE DES CHAMPS

LIGNE 08 | ÉDITORIAL | ÉTÉ 2023

Texte | Dave Richard

Photo | Olivier Collet [via Unsplash]

 
 

J’ai grandi à la limite de Trois-Rivières, dans un quartier de banlieue semi-rural en bordure du fleuve, étrange mélange de constructions disparates et de parcelles de nature sauvage. Nous habitions une maison à étages typiques des années 1980, avec garage double, remise et pergola. Mon père avait fait creuser notre piscine hors terre, l’avait sertie d’une glissoire et cernée d’une vaste terrasse. Il aimait son gazon bien vert, bien taillé, et ma mère ses plates-bandes généreusement fleuries et faciles d’entretien. Tous les étés, nous partions « dans le vrai bois », passer quelques semaines dans un chalet ou un autre donnant sur des lacs immenses, des montagnes bien vertes et le ciel grand ouvert. Mes amis me trouvaient chanceux quand je les retrouvais en rentrant, ce qui m’empêchait d’admettre qu’en fait, j’étais content d’être enfin de retour…


Bien sûr qu’à chaque séjour je passais de bons moments au chalet, surtout parce qu’il s’agissait avant tout de grandes réunions de famille. Bien sûr que j’ai trouvé l’écrin de la banlieue réconfortant tout au long de mon enfance. Bien sûr que je suis sensible aux splendeurs déconcertantes des contrées sauvages et au charme bucolique des routes de campagne. Par contre, j’ai toujours senti l’appel de la ville. Très jeune, j’ai rêvé de ruelles, de néons et de gratte-ciels, de parcs immenses, de voyages en métro et de trottoirs usés, enchevêtrés, infinis. Très jeune, j’ai vu la ville comme le lieu de tous les possibles et de toutes les rencontres, une source de fascination et d’étonnement constant.


J’habite Montréal depuis vingt-quatre ans, maintenant. Dès que je m’y suis installé, je me suis senti à ma place au milieu du bruit, du mouvement, des lumières et des touristes. Montréal, je la trouve stimulante, inspirante, excitante, généreuse. Je la trouve accueillante, chaleureuse, multiple et pas compliquée. J’aime arpenter la ville, fouiller ses quartiers, tous distincts, tous uniques, mais unis, son centre, comme un coeur battant, son histoire, son architecture… J’aime ses salles de spectacle, ses festivals, ses musées, ses places publiques, ses rues animées, ses restaurants, ses commerces, ses fontaines, ses galeries, ses bars. J’aime sentir la ville se réinventer jour après jour, éternellement nouvelle. J’aime mes voisins, leur amitié bienfaisante. J’aime la liberté que procure la proximité. La beauté de la ville est subtile. Elle relève de la poésie quotidienne. Elle est liée aux gens, à l’humanité qui vibre et qui vit, aux moments qui surgissent de la conjonction parfaite d’une panoplie d’éléments, souvent disparates, de leur collision inusitée.


« Le temps est venu d’aimer la ville et de lui dire », plaide Luc Ferrandez dans son très beau et très intéressant documentaire « Lettre d’amour à la ville », réalisé par Charles Gervais et disponible en ligne sur les plateformes de Télé-Québec. « Ça fait des décennies que les banlieues et les nouveaux quartiers se développent pour nous offrir plus d’intimité et moins de vie en commun. […] Je suggère que l’amour de la ville est l’un des principaux champs de bataille de toutes les luttes environnementales et sociales d’un siècle qui risque très fort de mal se terminer. […] Il faut écrire une belle, grande, longue, puissante lettre d’amour à la

ville. »


Il faut croire que le sujet était dans l’air, puisqu’au moment où j’entendais ces mots, nous concevions déjà ce nouveau numéro comme une déclaration d’amour pour la ville. Nous avions déjà eu envie de présenter des résidences foncièrement urbaines; des projets fascinants nés de la contrainte, inspirés par elle, comme le projet De Lorimier, qui consiste en une refonte d’un ancien hangar en une maison lumineuse où il fait bon vivre, ou la maison Park Ex, qui embrasse l’éclectisme architectural de son quartier. Nous avions déjà eu envie de vous parler de jardinage urbain, d’un projet participatif reliant Montréal à d’autres métropoles du monde par l’art, de vous faire découvrir le Supernat, charmante café-buvette du quartier Hochelaga-Maisonneuve, le restaurant Kabinet et la refonte de l’Insectarium.


Nous avions déjà eu envie de rappeler, au fil des pages de ce numéro, que la ville est bien plus que les malheureux clichés auxquels ceux qui la fuient la réduisent trop souvent, et bêtement. Nous espérons vous convaincre de redécouvrir la ville, cet été, la Ville avec un grand V, toutes les villes, n’importe quelle ville, d’un oeil nouveau. Parce que tout le monde a sa place, en ville; chacun peut y trouver son bonheur.


Bon été et bonne lecture,


Dave Richard | Éditeur

et toute l’équipe de Ligne


 

DAVE RICHARD


Dave Richard a fondé les Éditions de la Diagonale qui publient le magazine Ligne depuis 2020. Il est aussi rédacteur, traducteur, adaptateur pour le doublage de télévision et de cinéma et parolier (oui, oui).


Sur Instagram @daverichard.editeur










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