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MARIE-JOSÉ GUSTAVE

AU-DELÀ DES LIMITES DU PAPIER

LIGNE 07 | ART | HIVER 2022

Texte | Claire-Marine Beha

Photos | Nicolas Aubry + Marie-José Gustave + Mike Patten + La Guilde

 
 

C’est toute la polyvalence du papier que nous offre d’admirer Marie-José Gustave. Au premier regard, les formes de ses œuvres sculpturales qui font écho à la nature nous happent, puis des détails méticuleux et captivants se dévoilent, derrière lesquels on imagine les longues heures de découpage, de pliage, d’entrelacement, de modelage, de tressage... À travers sa fascination pour la matière et les méthodes artisanales qui lui donnent vie, l’artiste visuelle originaire de la Guadeloupe parle de quête plastique autant que d’émotions et d’identité.



Lorsque Marie-José était enfant, sa mère l’a initiée au tricot, au crochet et à la couture ; l’artiste a plus tard étudié en France la production du vêtement. Elle y a appris à concevoir des patrons, à apprivoiser les possibilités offertes par les textures des tissus. Elle s’est alors découvert une véritable passion pour les travaux manuels minutieux. Cet apprentissage des volumes a également posé la base de son travail artistique en trois dimensions.

En 1998, Marie-José Gustave s’est installée à Montréal et a développé une collection de bols et de lampes en carton. « Puis, intriguée par les caractéristiques du papier, j’ai commencé à faire des expérimentations en lui associant des techniques artisanales, comme la vannerie, le tissage, le tricot et le crochet », se souvient-elle. « C’est donc instinctivement que mes premières œuvres sont nées. »


Depuis, la créatrice autodidacte n’a cessé d’explorer le papier en le détournant de sa fonction utilitaire. Elle transforme cette matière polyvalente et repousse toujours plus loin les limites de sa fibre grâce aux nombreux procédés artisanaux traditionnels. Fils de papier et carton se muent alors en textile, prennent l’apparence du bois, de la céramique ou du plastique. « Que ce soit pour donner un volume au fil de papier, modeler la pulpe, coudre du Tyvek... L’idée est toujours d’amener ce matériau là où on ne l’attend pas, de lui conférer une nouvelle dimension, d’utiliser ses attributs de souplesse et de rigidité pour surprendre – moi la première ! »


L’artiste réalise souvent des sculptures de très grand format, massives, qui génèrent alors une tension avec la légèreté initiale du papier. Impressionnant par sa qualité d’exécution, l’art de Marie-José Gustave touche également à des sujets humains. Elle perçoit d’ailleurs le papier comme étant l’illustration parfaite de la résilience nécessaire aux êtres humains et à la société face au monde, au temps, à l’adversité. Elle considère que la tradition artisanale par laquelle naissent ses œuvres les rend intelligibles pour tous. « La matière et le geste sont les moteurs principaux de ma pratique ; je tricote, je tresse, je crochète, comme tant de femmes et d’hommes l’ont fait avant moi. Mes œuvres parlent de transmission et d’universalité, puisque ces techniques artisanales sont pratiquées depuis des générations dans le monde entier, sous une forme ou une autre. À travers elles, je crée un point de rencontre entre les

cultures. »


Dans sa série Métissage, liens tissés, elle place au cœur de son travail le thème de l’identité. Les œuvres de couleurs brunes, blanches et jaunes, qu’elle regroupe grâce à leurs symboliques et à leurs différences, véhiculent l’idée que leur convergence est synonyme de richesse et de complexité. C’est en sculptant le papier – et en mariant allègrement artisanat et art contemporain – que l’artiste rend visible la nécessité du métissage et son abondance. Le sujet environnemental est aussi très présent au sein de ses séries. Plusieurs de ses sculptures revêtent des formes évocatrices : écume, corail, écorce, coquillage, chute d’eau, végétal, etc. Il émane toujours une sorte de simplicité poétique qui nous convie à la contemplation et à la réflexion.

Une autre façon de saisir toute la puissance des œuvres de l’artiste est de tourner autour d’elles ; entre chaque sculpture et son ombre se développe un dialogue qui change selon la lumière et la perspective. Encore une fois, grâce à Marie-José Gustave, le papier s’érige et se permet d’incarner toute réalité.


L’été dernier, son travail a été présenté à la Maison du Conseil des arts de Montréal ainsi qu’à La Guilde, à Montréal. En 2023, l’artiste exposera à Révélations, la Biennale internationale des métiers d’art et de la création de Paris.



 

Sur Instagram @mariejosegustave

 



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