top of page
Photo du rédacteurMagazine Ligne

QUESTIONS DE GOÛT | DUMAS

BÊTE DE SCÈNE, MORDU DE CULTURE

QUESTIONS DE GOÛT | LIGNE 05 | AUTOMNE 2021

Propos recueillis par | Dave Richard

Photos | Louis-Philippe Eno + Sébastien Cordat [via Unsplash] + Clifford [via Unsplash] + Urban Vintage [via Unsplash]

 

Dumas. Photo | Louis-Philippe Eno.

 

Figure estimée de l’univers musical québécois, Dumas est l’un des plus doués et prolifiques auteurs-compositeurs-interprètes de sa génération. En 20 ans de carrière, il a créé 12 albums et de nombreuses chansons marquantes, en plus de devenir une formidable bête de scène, avec plus de 1 000 concerts à son actif. Réalisateur et auteur pour d’autres artistes, compositeur de trames musicales pour des documentaires et des films, des thèmes publicitaires et télévisuels, Dumas est un créateur infatigable.


En août 2020, son opus phare Le cours des jours, lancé en 2003, ressortait en version vinyle remastérisée pour célébrer le Jour du disquaire, créant un engouement extraordinaire qui l’a convaincu de réunir ses musiciens de l’époque pour revisiter l’album en intégralité le temps de quelques spectacles spéciaux prévus cet automne un peu partout au Québec. Curieux, brillant, boulimique d’art et de culture, il a accepté de partager avec nous ses fins coups de cœur avec enthousiasme et générosité.


Couverture de l'album Le cours des jours de Dumas.


Ligne | Tu es un artiste, mais aussi un grand consommateur de culture; cette première rentrée post-pandémie, tu l’imagines comment?


Dumas | Depuis mon adolescence, je me nourris de spectacles; je voyage dans les grandes villes pour visiter des expos ou voir des concerts. J’imagine donc que, petit à petit, ma passion pour l’art vivant reprendra le dessus. Premier spectacle à voir sur ma liste: American Utopia, de David Byrne, présenté de nouveau à Broadway.

L. | Qu’est-ce qui t’a le plus manqué l’an dernier?


D. | Je suis un solitaire de nature, mais la pandémie m’a fait réaliser à quel point j’aimais créer en équipe, échanger des idées, et la synergie de se retrouver plusieurs à travailler ensemble à un projet commun. J’ai compris l’importance de la résonance dans ma vie. J’essaierai donc de faire en sorte que mes prochains projets aillent dans cette direction. J’ai envie de provoquer des rencontres et de privilégier les œuvres collaboratives.


L. | Que retiens-tu de positif de la crise sanitaire que nous venons de traverser?


D. | J’ai l’impression qu’on a tous pris un temps d’arrêt, pour réfléchir et méditer, remettre en question nos valeurs et nos priorités, en quelque sorte. J’ose espérer que ça aura un impact sur nos choix à l’avenir, autant d’un point de vue personnel que global.


L. | Chez toi, c’est comment?


D. | Grand, blanc, ouvert et lumineux. Les espaces blancs, ça me rappelle la maison de John Lennon à Tittenhurst Park. Je crois que c’est bon pour l’esprit, la paix intérieure et la création. J’habite à quelques pas du parc La Fontaine. Chez nous, il y a des livres et des magazines un peu partout; mon fils et moi sommes de grands lecteurs! J’ai réuni au fil des ans quelques œuvres de l’artiste Jordan Nickel, que j’aime particulièrement; elles apportent de la couleur à notre appartement.


L. | Minimaliste ou collectionneur?


D. | Je dirais « collectionneur minimaliste »? J’essaie d’éviter l’accumulation d’objets, en général, mais j’ai un faible pour certains trucs précis, comme les figurines de collection Warhol, de Kid Robot, ou celles de Gorillaz. J’essaie de ne pas surcharger mon environnement… Déjà que j’abuse avec les disques vinyles! (Rires)


Figurines Dunny Andy Warhol Blindbox, Kidrobot + Figurines Gorillaz, Jamie Hewlett.


L. | Pour toi, l’environnement de création idéal, c’est quoi?


Dumas | Je dirais que la ville me nourrit; elle m’emplit d’idées et d’images. Par contre, en fin de processus créatif, j’ai besoin de me retirer en nature pour faire le ménage dans ma tête et revenir à l’essentiel. C’est comme ça que sont nés Le cours des jours et Nos idéaux. Avec le temps, j’ai compris que l’isolement en nature m’est profitable pour clore un projet; je crois que ça me donne du recul. J’aime bien créer à proximité d’un lac… Sinon, isolé quelques jours à Manhattan!


L. | Possèdes-tu un objet dont tu ne te départiras jamais?


Dumas | L’encadrement d’un mot personnel d’Alain Bashung. Pour moi, c’est un objet qui représente mes idéaux de jeunesse – rêver de faire de la chanson, rencontrer mes idoles, comme Bashung. J’aime ce genre d’objets qui nous rappellent d’où l’on vient. Ils agissent comme des points de mire, nous aident à ne pas dévier de notre trajectoire.


L. | De quoi ne peux-tu pas te passer?


Dumas | De musique. Peu importe l’endroit, les époques et le format, la musique a toujours été essentielle à ma vie. La musique, c’est le « design et l’architecture de l’âme »!


L. | Quelle pièce es-tu le plus curieux de voir quand tu entres pour la première fois chez quelqu’un?


Dumas | Je me rappelle qu’à l’époque des CD, la discothèque était mon premier arrêt en entrant chez quiconque! Maintenant que la musique s’est dématérialisée, je privilégie la bibliothèque. Je trouve toujours intéressant de découvrir ce que les gens lisent. Il s’agit d’une bonne façon de briser la glace, de cerner les intérêts de l’autre et de provoquer des discussions intéressantes.


L. | Dans quel endroit te sens-tu le mieux au monde?


Dumas | Dans une grande ville: New York, Londres, Paris… Au bord de la mer, aussi, comme dans le Maine, où j’arrive vraiment à décrocher et à tout oublier. J’essaie d’ailleurs d’y aller tous les ans.


L. | Quel lieu t’a le plus marqué?


Dumas | Le Tate Museum, à Londres. Ce fut un choc tant par rapport au design qu’à l’architecture: une ancienne centrale électrique transformée en musée d’art contemporain… Un must! J’adore Londres. J’ai très hâte d’y retourner.


Vue du Tate Modern Museum à Londres. Photo | Clifford [via Unsplash]


L. | Quel courant artistique te fait particulièrement vibrer?


Dumas | Ces temps-ci, je suis obsédé par le mobilier et les maisons mid-century, comme celle du musicien John Frusciante à Hollywood.


Sélection de meubles mid-century modern. Photo | Urban Vintage [via Unsplash]


L. | Préfères-tu partir en tournée ou revenir de tournée?


Dumas | J’adore rouler en voiture, écouter de la musique, mais je suis aussi quelqu’un d’hyper anxieux, d’exigeant et perfectionniste. Je dirais qu’il n’y a pas de sentiment plus apaisant que celui du devoir accompli en rentrant de tournée. Cela dit, les heures passées sur la scène sont les plus satisfaisantes – un état de grâce inégalable, un véritable nirvana!


L. | Tu as souvent chanté Montréal; qu’est-ce qui te plaît le plus de cette ville?


Dumas | Son mélange de beauté et de chaos. J’ai un attachement profond pour le chemin Olmsted et le mont Royal. J’y cours plusieurs fois par semaine; pour moi, c’est un lieu de méditation. Quelle chance d’avoir cet espace vert en plein cœur de Montréal!


Vue du mont Royal à Montréal. Photo | Sébastien Cordat [via Unsplash]


L. | Ton dernier coup de cœur design d’ici?


Dumas | J’aime beaucoup les vêtements de la marque québécoise Vallier, taillés tout en finesse, avec bon goût, à partir de lignes épurées. Vallier fait maintenant partie des incontournables de ma garde-robe de scène autant que de ma garde-robe de tous les jours.


L. | Ton dernier coup de cœur design hors Québec?


Dumas | Je dirais le Domino Park, à Brooklyn, un petit chef-d’œuvre d’aménagement. Les concepteurs ont réussi à intégrer des éléments industriels à ce parc qui redonne aux citoyens accès aux berges de la East River. La même équipe avait déjà conçu la fameuse High Line, il y a quelques années. Le Domino Park, c’est tout simplement magnifique; on voudrait pouvoir y passer du temps tous les jours. J’éprouve également un attachement particulier pour ce parc, puisque la photo qui se trouve sur la pochette de mon album Nos idéaux y a été prise alors qu’il était en construction. J’y étais aussi par hasard, avec ma famille, lors de la journée de son inauguration; c’est donc un lieu qui a marqué une partie importante de ma vie.


L. | Ton dernier coup de cœur artistique?


Dumas | Le premier album de Robert Robert. La relève musicale québécoise est en pleine effervescence. Le disque de Robert Robert est original, tout en étant très accrocheur et dansant. Un jeune talent à surveiller, que j’ai très hâte de voir en concert.


Couverture de l'album Silicone Villeray, Robert Robert.


L. | Un restaurant qui te fait craquer?


Dumas | Les restaurateurs ont dû se montrer très créatifs afin de survivre à la dernière année. J’ai la chance d’habiter près du Mousso; son équipe a fait un travail incroyable tout au long de la pandémie. J’ai très hâte de retourner y manger en salle. Antonin Mousseau-Rivard est incroyable, un vrai génie!


L. | Un endroit du Québec où tu aimes prendre des vacances?


Dumas | En 20 ans de tournée, j’ai eu l’impression de parcourir le Québec de long en large, mais l’an dernier, en vacances, j’ai découvert par hasard la route 216, entre Clapham et Saint-Jacques-de-Leeds. Il s’agit sûrement de l’une des routes québécoises les plus méconnues, avec ses panoramas appalachiens à couper le souffle! La preuve qu’il me restera toujours un coin du Québec à découvrir!


L. | Quand on veut te faire plaisir, on t’offre quoi?


Dumas | De la poésie. Je ne sais pas si c’est la pandémie qui a réveillé en moi d’anciennes amours, mais je me suis remis à lire de la poésie comme à l’adolescence.


L. | Qu’est-ce qu’on te sert à boire?


Dumas | Je me considère maintenant comme un spécialiste du sans alcool. Le marché a d’ailleurs explosé ces deux dernières années; il est devenu facile de trouver des produits de qualité puisque l’offre s’est décuplée. J’opterais donc pour un cocktail à base de Seedlip, premier spiritueux sans alcool produit en Angleterre, mais qui se trouve maintenant au Québec. Vraiment excellent.


L. | Des projets?


Dumas | En ce moment, mon principal projet est de mettre de l’ordre dans toutes les idées de chansons accumulées au cours des deux dernières années. Je serai sur la route tout l’automne, pour souligner la réédition en vinyle du Cours des jours. Les artistes et le public vivent quelque chose de spécial et d’inédit depuis la reprise des spectacles. Quand j’imagine l’avenir, j’ai un fort désir de me recentrer sur ma musique; j’ai donc l’impression qu’un nouveau projet musical devrait paraître avant longtemps!


 

DUMAS



Sur Instagram @dumasdumas_

Sur Facebook @dumasmusique




Comments


bottom of page