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SUZANNE | MARIE-PIER CARON + VICTOR MONTOUR

Dernière mise à jour : 26 janv. 2023

MODULER LA LUMIÈRE

INTERLIGNE | DESIGN | MAI 2022

Texte | Communiqué + Dave Richard

Photos | Victor Montour + Marie-Pier Caron-Desrochers

 
 

Au sein d'un atelier chapeauté par Guillaume Sasseville, deux finissants en design de l'environnement de l'UQAM ont conçu et réalisé du mobilier modulaire qui exploite la lumière de belle façon.


«Comment amener l'usager à interagir avec un objet de manière sensible, intuitive et pérenne? » Voilà l'une des questions que se sont posées Victor Montour et Marie-Pier Caron-Desrochers durant la conception de leur collection Suzanne. Sensibles et lucides face aux enjeux sociaux actuels, le duo a imaginé un système modulaire proposant une autre façon de voir et d'interagir avec le mobilier du quotidien.



Le projet Suzanne s'inspire d'une rencontre entre divers archétypes de la culture québécoise du mobilier. Né du constat que la participation humaine est de moins en moins valorisée durant la réalisation d'un produit, où par la suite, à travers l'expérience qu'il procure à l'usager, les deux étudiants on voulu remettre en valeur la relation riche entre l'objet et l'humain. Une relecture de méthodologies ancestrales leur permis d'adopter une approche vernaculaire et artisanale, faisant écho au passé, de la conception à la production.


Motivés par le désir d'agencer praticité et sensibilité, Montour et Caron-Desrochers ont puisé dans leurs souvenirs pour créer un produit à résonance intime, personnelle. Jumeler démarche de création et quête identitaire les a poussés à voir le design sous un angle nouveau, d'abord émotif, et à créer pour le futur usager une expérience sincère, humaine. Et si le design pouvait redevenir source d'émerveillement au quotidien? Et si l'on pouvait, grâce à lui, retrouver une certaine naïveté, malgré le cynisme ambiant?



La répétition de modules identiques permet de créer parfois une console, parfois une bibliothèque, parfois un banc ou de combiner plusieurs fonctions... La transformabilité du système Suzanne au gré des besoins et des désirs de son usager encourage ce dernier à l'adapter au fil du temps plutôt qu'à s'en départir.



Ligne | Vous dites vous être inspiré du patrimoine québécois du mobilier pour créer Suzanne; quelles sont les archétypes et les pièces qui ont nourri votre conception?


Victor Montour + Marie-Pier Caron-Desrochers | Plusieurs archétypes nous ont inspirés dans les proportions du mobilier: la console, le bahut, le banc de quêteux, l’armoire, le buffet, la chaise à assise tressée, etc. Diverses visites d’antiquaires nous ont guidés dans nos démarches préliminaires. Évidemment, le cannage a énormément inspiré la poésie et le langage graphique de notre projet, entre autres par les jeux d’ombres et de superpositions de trames.


L. | Vous dites aussi vous être inspiré de vos souvenirs pour créer Suzanne; comment imprègne-t-on une pièce de mobilier de son histoire? Qu’avez-vous tenté de transmettre au futur usager de Suzanne?


V. M. + M.-P. C.-D. | Suzanne s’inscrit dans un mouvement d’honnêteté avec l’usager. Des assemblages simples et un fonctionnement intuitif, en toute transparence. Tout comme à l’époque de nos grands-parents, les pièces de Suzanne sont réalisées de façon artisanale, avec des outils principalement manuels, occasionnant parfois certaines imperfections -- lesquelles ajoutent au caractère unique de chaque module. Lorsqu'on souhaite ancrer une nouvelle pièce de mobilier à son Histoire, nous coryons que celle-ci doit être le fruit d’une conception sensible, qui rend subtilement hommage au passé, tout en répondant à des besoins présents, tout en offrant diverses possibilités futures. Suzanne incarne une intention de retour au partage, au lègue intergénérationnel, par son caractère intemporel et son adaptabilité, qui assurent cette pérennité, autant pratique qu’esthétique. Suzanne offre des possibilités, une liberté rarement accordée à l’usager. Pour nous, il était important de se questionner sur ce qui rend un objet intemporel et pérenne. Le lien émotif qu'on développe envers lui y participe assurément, mais le caractère modulable permet aussi de prolonger sa durabilité, permettant la participation de l’usager - il permet au mobilier de s'adapter aux espaces, aux contextes et peut changer de fonction selon les besoins et désirs de l’usager. Cette approche participative invite et encourage l’usager à faire preuve de créativité, et renforce ultimement son lien émotif envers lui.


L. | Qu’est-ce qui a guidé votre choix de matériau?


V. M. + M.-P. C.-D. | Sensibles aux divers enjeux environnementaux entourant le domaine du design industriel, nous avons opté pour une matière locale et entièrement recyclable : l’aluminium. Aussi, nous avons appliqué la notion de mono-matière, ce qui signifie que notre mobilier est entièrement composé de feuille d’aluminium perforée, ce qui facilitera éventuellement sa récupération. De plus, la malléabilité de l’aluminium permet non-seulement un usinage plus accessible, mais également l’usure naturelle du mobilier, un témoignage subtil du passé, un peu dans le même esprit que la patine d’un cuire ou l’oxydation du cuivre. La matière vit, évolue et répond au passage du temps. Tout au long du processus de création, les notions de lumières ont influencé nos recherches; il s'agissait d'ailleurs de la thématique de notre atelier. Nous avons alors été guidés par la matière, ses limites et ses possibilités, pour ainsi arriver à diverses observations d’effets lumineux et de jeux d’ombres qui ont nourri notre concept.


L. | Vous présentez Suzanne dans un décor agricole. Les photos sont très belles, et empreintes d’une poésie de contradiction - Suzanne étant plutôt brutaliste et pas du tout champêtre. Qu’est-ce qui vous a poussés dans cette direction.


V. M. + M.-P. C.-D. | Les photos ont été prises chez Suzanne, dans le petit village d’Upton. Ces champs incarnent la fragilité d’un patrimoine agricole en voie de disparition, tout comme le savoir-faire artisanal québécois. L’agriculture étant un domaine de plus en plus automatisé, cette compétition entre l’artisan et la machine résonne également dans la trame narrative du projet. En effet, la notion de contradiction entre le langage naturel et industriel soulève cette cohabitation improbable, mais toutefois intéressante. En résulte alors une poésie de contraste, une dichotomie harmonieuse. Le concept provenait de souvenirs d'enfance, de poésie à travers les objets qui nous entourent et le désir d’un design plus humain. L’apparence finale de la collection Suzanne peut sembler brutaliste, mais nous avions aussi le désir d’illustrer la genèse du projet et de faire questionner les gens sur le processus créatif et les enjeux actuels qui concernent le design.


L. | Vous étiez cette année finissants; qu’est-ce qui vous attend? Qu’est-ce vous attire?


V. M. | L'automne prochain, j'entamerai un Master of Advanced Studies en conception pour l’artisanat et le luxe à l’École cantonale d’art de Lausanne. J’aspire à offrir des expériences sensibles, intimes et durables par le biais d’interventions à diverses échelles.


M.-P. C.-D. | J’ai toujours été nourrie par divers projets créatifs. J’aime concevoir un projet du début jusqu’à la direction artistique, pour le mettre en lumière. J’ai eu un parcours en architecture et en art visuel avant d’avoir fait le baccalauréat en design de l'environnement, donc ma pratique multidisciplinaire se penche sur l'ambiguïté de ses disciplines qui, pour moi, appartiennent au même monde sensible. J’ai le désir d’un design plus lent, plus humain, durable et accessible. Je compte prendre une pause de l’école pour continuer mes projets artistiques, ainsi que des collaborations avec des artistes et designers pour mettre leurs projets en images avec de la représentation graphique/rendering. Puis, éventuellement, j’aimerais poursuivre une maîtrise à l’international, afin d’approfondir ma réflexion concernant le processus créatif et les enjeux qui entoure le design.




Conception | Victor Montour + Marie-Pier Caron-Desrochers

Supervision | Guillaume Sasseville


 

MARIE-PIER CARON-DESROCHERS


Marie-Pier Caron-Desrochers est étudiante au baccalauréat en design de l’environnement. Passionnée par le design et les arts visuels, elle s’interroge sur l'ambiguïté de ces deux disciplines, par son travail multidisciplinaire soutenu par des modes de représentation. Sa pratique explore la modulation de l’espace, par le biais de la lumière et de la matière, dans l’optique de créer un dialogue entre ceux-ci, qui est à la fois contrôlé et équilibré. Du design industriel , passant par l’architecture et l’urbanisme, elle tente d’explorer les limites et la temporalité du sujet, en restant fidèle à ses propres règles esthétiques qui naviguent entre la simplicité, l’élégance et l’authenticité. Ainsi, sa démarche s’appuie sur les dualités et la réinterprétation de notre environnement, à plusieurs échelles, dans l'espoir de dévoiler les multiples nuances qui vont à la rencontre d’un univers sensible. [Source | Annuel de design 2022 de l'UQAM]



Sur Instagram @mariepier_caron


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VICTOR MONTOUR


Passionné de mode, d’art et de design, Victor Montour inscrit sa pratique dans un éventail de disciplines ; objet, mobilier, installation, architecture, scénographie, photographie et autres. Il préconise un processus intuitif, par l’emploi de différents médiums, dont le collage. Ses projets tendent vers l’élaboration du lien émotif, l’appréciation de la relation intime entre l’usager et le produit. Sensible, il puise dans son passé, nous donnant ainsi accès à sa vulnérabilité et sa fragilité. Ancré dans son identité québécoise, il propose une relecture contemporaine des archétypes, issus de la mémoire collective. En découle alors, des projets fondés dans l’émotion, marqués d’une poésie agile et d’une simplicité assumée et contrôlée. Victor Montour aspire à devenir un créateur généreux, humble et investi dans sa communauté. [Source | Annuel de design 2022 de l'UQAM]


Sur Instagram @victormontour + @vautour.design


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ÉCOLE DE DESIGN DE L'UQAM


L'École de design de l’Université du Québec à Montréal offre six programmes d’études de 1er et 2e cycles en design. L’École de design contribue à l’enseignement, à la recherche-création et au rayonnement des disciplines du design au Québec depuis plus de trente-cinq ans. Plusieurs des professeurs et chargés de cours ont vu leur travail de production, de recherche ou de création consacré par des prix d’excellence ou des distinctions lors de concours nationaux et internationaux. Leurs travaux diversifiés reflètent la richesse des champs couverts en design graphique, en design industriel, en design architectural et urbain, en design d’événements, en design d’équipements de transport, en patrimoine moderne et en design de mode. [Sources | École de design de l'UQAM + Wikipedia]



Sur Instagram @ecoledesignuqam

Sur Facebook @ecoledesignuqam

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