RELIEF VÉGÉTAL
LIGNE 04 | ART | ÉTÉ 2021
Texte | Isabelle Pronovost
Photos | Katya Konioukhova + Véronique Buist
Maniant aussi habilement l’aiguille à broder que le tamis servant à la fabrication du papier, l’artiste multidisciplinaire Véronique Buist crée des œuvres d’une grande douceur qui évoquent des paysages tantôt naturels, tantôt urbains.
C’est en 2012, deux ans après avoir complété un baccalauréat en arts visuels et médiatiques à l’UQAM, que Véronique Buist découvre par hasard la broderie comme médium artistique. « J’habitais Paris à l’époque et je passais beaucoup de mes temps libres à créer en faisant de la photographie argentique. C’est en explorant que j’ai voulu percer le papier, et le fil est apparu comme une façon de remplacer le crayon dans l’action de dessiner. » Naît de cette découverte le projet imposture (2012-2015) dans lequel plus de 80 photos empruntées ont été brodées et exposées en Europe et à Montréal. « Comme son nom l’indique, ce projet m’a accessoirement permis de mettre de côté le syndrome de l’imposteur quant à mon statut d’artiste. »
Désormais pleinement assumée, Véronique se consacre depuis 2016 à son art au quotidien. Elle partage son temps entre son atelier à la maison – pour la partie broderie – et l’atelier Retailles, où elle fabrique son papier. D’ailleurs, sa rencontre avec Sophie Pelletier-Voyer, la fondatrice de Retailles, marque un moment décisif dans sa pratique. « Grâce à elle, j’ai appris à fabriquer moi-même mon papier à partir de mon fil de broderie pour obtenir un ton sur ton parfait avec le motif brodé. Depuis, j’explore différentes matières qui servent à fabriquer le papier, en plus d’avoir développé une amitié des plus précieuses avec elle. Tout ce processus a permis de placer la fibre et le papier au centre de ma réflexion, de ne plus le percevoir comme un support de l’œuvre, mais bien comme une œuvre en soi. »
Les inspirations de l’artiste sont multiples : couleurs, matières et textures, notamment celles de la nature. Plus concrètement encore, fleurs et végétation font partie de son langage plastique, ce qui n’est pas étonnant considérant l’autre talent de Véronique. « Je suis également fleuriste, et le travail de l’organique dans l’espace alimente grandement ma pratique artistique. La notion du paysage, de texture et de mouvement se traduit dans mes broderies comme dans les installations végétales botaniques que je produis. » Elle reconnaît aussi avoir une attirance pour le minimalisme brut, autant dans le domaine de l’art que dans celui du design et de l’architecture. « Je trouve fascinant d’être capable de pouvoir exprimer une intention en réduisant au maximum les éléments pour y parvenir. »
Récipiendaire de bourses du Conseil des arts et des lettres du Québec, du Conseil des arts du Canada ainsi que des Offices jeunesse internationaux du Québec, Véronique Buist a présenté en octobre 2019 une exposition solo intitulée fleurs et fêlures et participé en février 2020 à la foire d’art contemporain Artist Project à Toronto. Et celle qui aime opérer par série afin d’aborder des sujets spécifiques qui l’inspirent et l’interpellent a profité du confinement pour broder deux séries d’œuvres : paysagisme, les plans (des jardins imaginés, comme une sorte d’hommage au printemps manqué) et roche-montagne (un exer- cice de broderie-dessin d’un élément de la nature qui symbolise à la fois une embûche et un objectif).
Son plus récent projet – balise – est exposé à la Maison de la culture Claude-Léveillée dans le quartier Villeray, à Montréal, jusqu’à la fin mai 2021. Les six œuvres grand format de papier brodé sont directe- ment inspirées de photographies de l’architecture du quartier reçues à la suite d’un appel au public. Pendant ce temps, l’artiste planche déjà sur un autre projet : une collaboration avec un danseur contemporain pour lequel elle développe l’aspect scénique autour de la broderie, du textile et de la végétation. Qui aurait pu imaginer tous les usages qu’on peut faire d’un fil à broder?
Sur Instagram @verobuist
Sur Facebook @veroniquebuistartiste
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